jeudi 15 décembre 2011

ELEPHANT DANS UN MAGASIN PHOTO

Avant l'ère de la photo numérique, au siècle dernier donc, je voulais prendre des cours de photo. J'étais sur le point de concrétiser quand les premiers engins sans pellicules sont apparus. Ça m'a semblé bizarre de se décider à ce moment-là à apprendre à se servir des modèles de l'ancien régime. Comme de se mettre à la perruque pendant la révolution française : on risque la guillotine en place de grève. 
Mais le monde n'était pas prêt pour mon arrivée dans le numérique. Rappelons que les premiers appareils numériques pesaient une enclume pour deux cent mille pixels seulement, et coûtaient un bras et un bout de jambe. Autant patienter, vu qu'outre la tête, je préfère aussi conserver mes membres.  
En attendant, les labos photo ayant disparu, je me suis mis à prendre des photos avec mon téléphone. Depuis un peu plus d'un an on parvient même à reconnaître les gens que je photographie: Halleluyah! 
Mais à présent les gros numériques font 18 millions de pixels, arrivent à peu près à la cheville de mon antique Zenit tout manuel, et sont presqu'abordables. Il est temps de se remettre à la photo. Comme je n'aime guère les contraintes, j'ai opté pour une association de photographes qui me permettra d'apprendre sans que le Père Fouettard me donne des cours. 
Je suis donc allé à ma première réunion de passionnés et futurs passionnés. Justement nous étions deux nouveaux futurs.

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Éléphant dans un magasin photo livre 1 
  On nous a demandé de nous présenter. Romain d'abord : "Bonjour, je m'appelle Romain, j'avais envie de progresser au contact d'autres photographes, j'ai entendu parler de vous par une amie, comme appareil j'ai le marc 12280 modèle 5S triple embrayage à déclenchement à injection, et j'ai amené quelques photos, prises par hasard. C'est un peu concepteu, mais avec le logiciel de retouche (coutant deux mois de salaire) que j'ai, je n'ai pas pu les travailler plus" (il aimerait en changer, si quelqu'un a une petite réduction pour le logiciel valant un an de salaire moyen). 
Suivent des photos qui représentent des nuages filés, il appelle ça la place de l'hotel de ville filtrée au dn5. Tout le monde s'extasie, c'est vrai que c'est un peu concepteu, moi je dis ce serait très beau comme photo abstraite dans mon entrée, à la place de ma photo de New York. 
C'est à mon tour. "Je m'appelle Flavien, c'est un peu comme Romain, j'aimerais progresser, je prends des photos avec mon téléphone et je vous ai amené des photos de mon chat". 
Silence très visuel, solitude intense. 
Un participant dit timidement que ça peut être intéressant d'explorer ce qu'on peut faire avec des photos de téléphone. 
Silence. 
Le président indique que sinon, il vend un de ses anciens appareils, de 2005, pour seulement 400 Euros. Tout le monde a l'air soulagé comme si Carla Bruni venait de finir d'accoucher sous le sapin du Noël de l'Elysée devant les enfants. Le secrétaire de l'association scrute mes photos de très près, commente le manque de profondeur de champ, et me pose une question sur les données exif de la photo. 
Les données quoi?  Un autre participant me répond très lentement, en détachant les mots, que ce sont les détails de la prise de vue avec la vitesse, la focale, toutes les données de la photo, quoi. 
L'évidence. 
Avant de se quitter on rappelle les thèmes d'une prochaine fois, notamment on veut travailler sur le vertige en pose longue. Tout le monde trouve le thème excitant, je me sens décalé comme un échappé de l'asile. 
Et me jeter du haut d'un pont, ça le ferait, pour le thème vertige?

mercredi 7 décembre 2011

COMPROMIS DOMESTIQUES

Je crois qu'il n'y a pas de couple durable sans compromis. Ma première machine à laver premier prix ayant de suite décidé qu'elle ne chaufferait plus, j'avais pris l'habitude de tout laver à l'eau froide. Habitude que j'ai conservée en changeant de machine, ça évite les rétrécissements intempestifs.
Il faut dire que ma méthode de traitement du linge est d'une simplicité géniale: je verse le contenu du panier à linge dans la machine, puis une quantité intuitive de lessive, consciencieusement dans le bac prévu pour. Je tourne ensuite le bouton sur l'un des chiffres cabalistiques, généralement trois quelle que soit la marque de la machine, le trois me réussit. Malgré quelques incidents de temps à autres, j'étais satisfait de mes prestations. 
Pourtant Gabriel n'arrivait pas à s'habituer aux nuances de teintes créatives que prenaient les vêtements au contact les uns des autres. Par exemple une chemise rose mariée avec un pantalon bleu marine prend une jolie couleur violette très originale. Mais ça ne lui plaisait pas, les goûts et les couleurs! Pour le fer à repasser, même technique. Réglé sur trois, tout se défroisse très vite. A l'occasion, on ne doit pas oublier de racler la semelle pour enlever la couche de brulé qui s'accumule progressivement. J'ai donc dû faire une concession, Gabriel gère les vêtements. 
Comme je ne m'occupe plus du linge, j'ai reporté tout mon talent à saccager pour les repas les bons produits que nous trouvons chez les paysans du coin. Et ainsi cahin-caha, nous gardons la santé, une garde-robe utilisable, et l'envie de manger au restaurant. Bien que je déteste ça, je suis assez efficace en bricolage, et j'assure donc la plomberie ou l'électricité. Gabriel pour sa part se charge de râler dès qu'il s'avise qu'il faut d'urgence une prise à un endroit où en trois ans elle n'avait encore jamais manqué.

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Compromis domestiques Biches de Franz Marc domaine public 
 Il y a des limites aux compromis. Les frontières à partir desquelles cela deviendrait des sacrifices. 
Je n'aime pas habiter Paris, voilà une chose qui n'est pas négociable. Un grand loft avec terrasse à New York en revanche, je pourrais me faire une raison. Hélas Gabriel ne me le propose pas. Sûrement parce qu'il ne veut pas alimenter mon esprit de sacrifice. 
On a commencé à discuter à partir de deux ans de vie commune. Avant on vivait dans l'illusion que tout se passait naturellement bien, et que le conjoint était un saint auréolé et diplômé en perfection absolue. Au moment où l'on a perdu cette vision chimérique, on risquait de ne plus voir que le monstre qu'il était. Alors qu'avec quelques aménagements il fait en réalité un tyran supportable. 
Plus ou moins tous les sept ans, on ressort le tapis de palabres, et le calumet de la paix. 
Après seize ans cette semaine, notre couple tient, pour l'instant, à force de sensualité renouvelée, d'estime ou d'amitié vigilante, et de compromis domestiques.

vendredi 2 décembre 2011

RUBAN ROUGE

Chocolat ou café, un peu découragé hier, a remarqué que le 1er décembre on pensait aux séropositifs et à la prévention du sida, et que dès le lendemain tout était oublié.
Et ben non : On est le 2!
J'ai lu entre autres les billets vidéo de Tambour Major, percutant, et celui de Deef, que j'aime beaucoup, plus soft.
Être séropositif, ce n'est toujours pas une partie de plaisir. Alors je persiste, se laisser aller au bareback, ne pas se protéger, c'est encore aujourd'hui inconscient ou criminel. Il y a bien d'autre moyens de trouver l'excitation.
On peut :
- Etre fidèle en couple exclusif depuis plusieurs mois et pratiquer du bareback qui n'en est plus. C'est plus excitant qu'on ne croit.
- Le fétichisme est une source de plaisirs infinie : rien que dans un catalogue par correspondance il y a des dizaines de milliers d'objets et vêtements. On peut être très créatif.
- Le SM quand on a confiance apporte des jouissances extrêmes avec préservatifs. S'arrêter au bon niveau de souffrance, être attentif à l'autre c'est une expérience.
- Les mises en scènes de fantasmes peuvent rendre les préliminaires plus excitants que l'acte lui-même. Avec capotes.

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Ruban rouge
 - La sexo orale fortifie la mâchoire et la langue, contribuant à une bonne hygiène dentaire. Incroyable comme on est occupé quand on a la bouche pleine.
- La sexualité de groupe ça pimente, il y a comme un plus de sentir ou voir les autres (tous protégés).
- Les massages intimes, ou très intimes, permettent de battre des records de durée, et on peut dire : "j'ai fait l'amour pendant quatre heures". On huit heures pour les endurants.
- Faire l'amour dehors, dans tous lieux et toutes sortes de circonstances ajoute un frisson de risque ou le plaisir du soleil sur la peau. Il suffit d'avoir des capotes sur soi.
- On trouve dans les boutiques spécialisées ou sur internet des toys : rien que comprendre comment on s'en sert on est au bord de l'extase.
- Internet a modernisé la bonne vieille diffusion de films pornos, il n'y a pas de mal à regarder les gens qui aiment être regardés. Surtout s'ils pratiquent sans risque.
- Dans le même genre d'aucuns font ça à distance avec un inconnu à l'autre bout de la planète par toile interposée. Les joies d'une culture différente.
- Le bondage pour ceux qui supportent, rend le partenaire de jeux très attachant, ou très attaché, c'est selon.
- Pigalle n'a pas le monopole du striptease, à la maison c'est aussi la fête.
- En pratiquant un sport, les endorphines s'ajoutent aux dopamine, sérotonine, ocytocine, vasopressine, pour multiplier le plaisir. Il ne faut pas sous-estimer le pouvoir de la sueur...
- Détourner un hétéro, il y en a que ça rend fou de plaisir. Des hétéros j'en connais qui ne demandent que ça.
- Certains adorent les jeux de miroirs, les enregistrements vidéos ou les photos. la preuve c'est qu'on ne manque pas de peoples sur le web. On peut se revoir, et voir des choses habituellement invisibles.
- Il y a le poil, que l'on peut raser partiellement, tondre, ou pour les amateurs se perdre dedans. Comment s'appelle t-il déjà, l'acteur qui joue dans prince of persia?

Bon, on peut pratiquer tout ça sans risque de transmettre ou d'attraper autre chose que du plaisir.